À Madagascar, les handicapés font encore face à de nombreux problèmes comme le manque d’accès aux soins, à l’éducation, le manque d’infrastructures adaptés à leur handicap, comme nous l’explique Razaka Ralphine, présidente du Réseau national des femmes handicapées de Madagascar.
Il n’existe pas de chiffres exacts sur le nombre de personnes handicapées à Madagascar ?
C’est un sujet qui n’intéresse pas les gens, donc nous n’avons pas de chiffres officiels.
Il faut savoir qu’il y a quatre grands types de handicap, physique, visuel, auditif et mental. Mais il y a également des handicaps qu’on ne prend pas en compte, comme l’autisme.
Dans les pays développés, les personnes atteintes d’AVC (accident vasculaire cérébral) sont considérées comme handicapées et l’acceptent. À Madagascar, on ne les classe pas comme telles.
Comment définir le handicap ?
C’est une indisposition d’un ou plusieurs organes chez un individu, qui bloque sa capacité à effectuer les gestes du quotidien. Le handicap est incurable.
En revanche, le terme « personne en situation de handicap » veut dire que c’est passager.
Comment sont perçus les handicapés au sein de la société malgache ?
Les personnes handicapées partagent le même problème : le manque de considération vis-à-vis de l’État et de la société, je dirais que c’est du dédain. Il y a également le manque d’éducation, car dans la plupart des cas, les écoles sont loin et il est difficile pour une personne handicapée de se déplacer.
Pourtant, une loi existe ?
Il y a la Loi n° 97-044 du 2 février 1998 sur le droit des personnes handicapées à Madagascar mais elle est insuffisante. La plupart des personnes handicapées et même les responsables politiques ne connaissent pas son contenu ! De plus, les pays sous-développés n’ont pas de représentants dans les différentes réunions mondiales, continentales ou régionales contre le handicap, même si Madagascar est financé par Handicap International, une association qui agit dans les situations de pauvreté et d’exclusion aux côtés des personnes handicapées.
C’est là où vous entrez en jeu…
Il fallait un représentant pour aller à New York et j’ai été choisie parce que je correspondais aux critères exigés par les bailleurs. Nous avons vu tous les aspects de la Convention qui été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2006. Mais pour qu’elle soit applicable, il faut d’abord la ratifier. À mon retour à Madagascar, j’ai plaidé pour cette Convention qui n’a été ratifiée par notre pays qu’en 2015, dix ans plus tard ! Le ministère de la Population a finalement mis en place un comité interministériel et nous avons pu exiger que chaque fois qu’il y aurait des discussions sur le handicap, nous devions être convoqués.
« Les pays pauvres n’ont pas de représentants dans les différentes instances contre. le handicap »
Aujourd’hui, cette convention est-elle appliquée ?
Malheureusement, non, même si je suis devenue entretemps le responsable des personnes handicapées et des personnes âgées au sein du ministère de la Population, de la Protection sociale et de la Promotion de la Femme, ce qui était déjà un grand pas. Nous pouvons nous battre, non plus dans la clandestinité, mais ouvertement. J’ai quitté le ministère car la direction où j’étais a été abrogée, donc rien n’a vraiment été fait.
Et depuis ?
J’ai pris une retraite anticipée pour me consacrer aux associations et j’ai constaté que les personnes handicapées à Madagascar manquent de soins, de nourriture et de connaissances en matière de droit. Par exemple, aux Pays-Bas, l’équipement pour les personnes handicapées comme les fauteuils roulants, les appareils auditifs ou orthopédiques est pris en charge par l’État. Madagascar et de nombreux pays africains sont encore loin derrière.
Parlez-nous de la Plateforme des fédérations des personnes handicapées ?
Elle est à Madagascar l’interlocuteur officiel auprès de l’État, des bailleurs, des organisations internationales et des organisations des droits de l’Homme. J’ai aussi pris l’initiative de créer le Réseau national des femmes handicapées de Madagascar (RNFHM), car si nous avons des droits communs, nous savons que les femmes ont des besoins spécifiques. La lutte est encore longue.
Propos recueillis par Aina Zo Raberanto