Le cacao malgache conserve sa réputation de « cacao fin 100% » labélisé par l’ICCO – Organisation Internationale de Cacao en juin 2023. Bien que le cacao représente une source majeure d’exportation, sa production demeure encore tributaire de modestes agriculteurs, mais des efforts sont mis en place pour assurer de meilleurs revenus aux paysans et surtout préserver l’impact de cette filière sur l’environnement. Un travail de pérennisation de la filière suit son cours explique Sylvain Velomora, secrétaire exécutif du Conseil National du Cacao (CNC).
Le cacao de Madagascar préserve son label « Cacao fin 100% » ?
Depuis 2016, Madagascar a obtenu ce label et le préserve jusqu’à maintenant. Nous sommes le seul pays africain a être labellisé pour 100 % de sa production. La production de cacao a augmenté ces dernières années passant de 9 000 tonnes de cacao en 2016 à 15 400 tonnes en 2023 sur une superficie totale de 30 000 hectares exploitées par 29 000 producteurs. Notre cacao est d’une qualité exceptionnelle grâce aux sols fertiles principalement dans la région de DIANA dans la plaine de Sambirano qui produit 95 % des fèves de cacao. À Madagascar, trois variétés de cacao sont cultivées. Il y a d’abord le Forastero ou cacao de base ; il est caractérisé par une cabosse verte qui devient jaune après maturité et des amandes violettes et plates. Cette variété représente la moitié de la production dans la région.
On retrouve également le Criollo ou cosse claire caractérisé par une cabosse verte ou rouge avant maturation. Enfin, le Trinitario, un hybride entre le Criollo et le Forastero qui représente 30 % de la production. Le cacao malagasy se distingue par sa qualité et son patrimoine génétique. Mais obtenir ce label « Cacao fin 100% » signifie aussi que la filière cacao répond aux normes internationales.
Justement, la culture du cacao face aux défis environnementaux ?
Heureusement, la culture du cacao n’a pas d’impact sur l’environnement, notamment la déforestation. De plus, le nouveau règlement de l’Union Européenne qui entrera en vigueur en décembre 2024, met en garde sur la déforestation importée, c’est-à-dire que cette mesure lutte contre la déforestation en interdisant des produits issus de cette pratique. Pour cela, nous pratiquons la plantation de cacao sous ombrage. Nous plantons d’abord des arbres d’ombrage notamment les bananiers qui enrichissent les sols et nous n’utilisons pas de produit chimique. Un de nos défis, c’est aussi de réussir à mettre en place un système de traçabilité qui répond aux exigences de l’UE qui permettra de sécuriser nos produits et de rassurer nos clients. Nous disposons déjà d’un laboratoire d’analyse physique à Ambanja, garant de la qualité de nos produits. Cette année, nous contribuons également à la reforestation à travers la plantation des espèces indigènes en collaboration avec dix pépiniéristes qui produiront 10 000 plants éparpillés dans toute la zone. Par contre, la région de Sambirano est menacée par la riziculture sur brûlis, c’est plutôt dans ce sens qu’il faut agir.
« La culture du cacao n’a pas d’impact sur l’environnement »
Qu’en est-il de l’amélioration des revenus des paysans ?
Les revenus des paysans passent au niveau des regroupements au sein des coopératives de producteurs. Nous encourageons ainsi les producteurs et les opérateurs à travailler ensemble en vue de la certification de leurs produits. Concernant les prix, le kilo de fève fraîche ou hors champ est de 5 000 Ar tandis que celui des fèves sèches supérieurs atteint 16 000 Ar. Les prix sont maintenus depuis le deuxième semestre de l’année 2023 jusqu’à maintenant. Par contre, les paysans sont face à une problématique : le vieillissement des plants et le manque d’entretien des parcelles, ce qui entraînent une diminution de la production. Nous avons donc misé sur la dotation de jeunes plants, en les cédant à 600 Ar au lieu de 2 000 Ar. C’est une coopération entre le projet PIC, le FOFIFA et le CNC. Bien sûr, avant de distribuer les jeunes plants, nous faisons des formations en termes de bonnes pratiques durables pour, d’une part, assurer la relève des vieux cacaoyers, et d’autre part, la redensification des parcelles. Au cas où, dans certains endroits, il y a encore des périmètres qui sont disponibles, nous pouvons faire une extension mais sans remettre en cause le respect de l’environnement. Nous sommes très stricts là-dessus. Aussi, nous avons opté pour un système agroforestier. Pour diversifier les sources de revenus des paysans, nous les incitons à planter du café, des bananiers ou des orangers. Mais nous remarquons que Madagascar importe beaucoup de chocolats, cela mérite matière à réflexion.
D’où la formation d’artisans-chocolatiers locaux ?
Il est important de soutenir les acteurs de la filière et de faire comprendre aux paysans, les enjeux. Nous incitons ainsi les producteurs à transformer les produits sur place. Depuis l’année dernière, nous avons commencé à former de jeunes chocolatiers artisanaux. L’idée, c’est d’apporter de la valeur ajoutée aux produits, mais aussi de donner un supplément de revenus à travers la transformation de fèves de cacao. Au lieu de faire les formations à Tana, nous l’avons fait à Ambanja avec 10 jeunes formés et nous comptons en former 30 de plus, cette année. Cela contribue également à la création d’emplois. Les jeunes ont déjà pu produire leur propre chocolat, très prisé les touristes.
« La production de cacao a augmenté ces dernières années passant de 9 000 tonnes de cacao en 2016 à 15 400 tonnes en 2023 »
Propos recueillis par Aina Zo Raberanto
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