Il a participé à la septième édition du Festival Stritarty organisé par l’Alliance Française de Diego-Suarez en octobre dernier. Pour son premier séjour à Madagascar, le graffeur français a été impressionné par la motivation des artistes locaux, malgré le manque de moyens. « Madagascar a clairement une influence asiatique dans sa culture. Malgré les contrastes, je vois des similarités. Les artistes, par contre, ne sont pas influencés de la même manière, le contexte local y est pour beaucoup. »
Chifumi est entré dans le milieu de l’art de rue après des études en communication et techniques de l’image, doublées d’une école des beaux-arts. « L’idée d’utiliser les méthodes du marketing mais dans une approche centrée sur la créativité graphique et gratuite m’a totalement conquis. J’ai plongé dedans pour la spontanéité et la beauté du geste. Il y avait aussi une sorte de militantisme, on s’en rend compte avec le poids des années. »
Installé au Cambodge depuis une dizaine d’années, Chifumi a grandi en Europe avant d’opter pour l’Asie. « J’ai été conquis par l’univers vibrant et fascinant de ce monde entre l’Inde et la Chine. J’y ai naturellement trouvé une place d’acteur créatif. » Mais sa plus grande source d’inspiration reste le voyage. « Chaque nouvelle destination est prétexte à peindre, pour mieux rencontrer l’ailleurs. S’enivrer de ses saveurs, ses couleurs mais aussi sa sémantique culturelle. J’ai l’habitude d’expliquer mon travail par le concept de traduction culturel. C’est clairement le moteur de mon processus créatif, en prendre plein les yeux sans rien comprendre. L’imagination fait le reste. »
Parfois décrié et ramené à du vandalisme, l’art urbain a pourtant sa place dans nos sociétés post-industrielles. Un moyen d’expression non institutionnel se servant des murs comme supports. Apparu aux États-Unis il y a plus de 50 ans, l’art du « writing » (nom que les graffeurs préfèrent à celui de graffiti) connaît pourtant aujourd’hui une forme d’académisme, faut-il s’en inquiéter ? « Les fresques murales sont partout, les municipalités font la promotion des artistes urbains au même titre que les sculpteurs ou peintres dans une autre époque. D’art subversif c’est devenu le courant dominant », reconnaît Chifumi. Pour les prochains mois, son agenda d’artiste de rue est bien chargé : « Je vais réaliser de grandes fresques murales en Inde, au Cambodge et en France. Ensuite, je compte préparer une exposition personnelle, la dernière remonte à dix ans. »
Aina Zo Raberanto