Tsimihipa Andriamazarivo (ONG Tolotsoa) « Les Malgaches ne connaissent pas leurs droits »
5 octobre 2022 // Assos // 636 vues // Nc : 153

Lutte anticorruption, promotion de la démocratie, observatoire parlementaire…l’ONG Tolotsoa multiplie les actions pour permettre au public de mieux connaître ses droits. Plus les citoyens s’intéresseront aux affaires publiques et mieux le pays se portera, explique Tsimihipa Andriamazarivo, coordinateur de l’ONG.

L’ONG Tolotsoa au départ ?
Elle est créée en 2010 à travers un projet de soutien à la scolarisation , en créant une cantine et en apportant des copies d’acte d’état-civil aux « enfants fantômes » qui n’en avaient pas. Au cours de cette action ponctuelle, Tolotsoa et ses partenaires ont rencontrés plusieurs obstacles, dont la corruption qui était favorisée en grande partie - nous l’avons compris - par la méconnaissance des parents en ce qui concerne la loi et les procédures.

D’où votre réorientation sur les questions de la bonne gouvernance ?
Nous nous intéressons à toutes questions relatives au bon fonctionnement de l’administration, à la participation citoyenne et à l’engagement civique. Nous développons des outils et des actions qui permettent de renforcer les capacités et les connaissances des jeunes et des citoyens en général, sur les thématiques de la lutte contre la

corruption, le processus électoral, le rôle des différentes institutions. Le grand drame de Madagascar est que beaucoup de nos concitoyens ne connaissent pas leurs droits   fondamentaux en ce qui concerne les services que l’État doit leur fournir.

Vous estimez que les jeunes ont un rôle capital à jouer…
Ils constituent aujourd’hui la majeure partie de la population mondiale et cette caractéristique se retrouve bien entendu en Afrique et à Madagascar. Malheureusement, ce poids ne transparaît pas dans le processus de prise de décisions actuel alors que ce sont les jeunes qui en subissent et en subiront demain les conséquences. « Tout ce qui est fait pour moi, sans moi, est fait contre moi », cette citation de Mandela, inspirée de Gandhi, résumer bien le propos.

Qu’est-ce que le « learning by doing ? »
Nous prônons cette méthode pour développer la compétence et l’intérêt pour la chose publique. Plus les citoyens et les jeunes seront intéressés par la conduite des affaires publiques mieux le pays se portera. Notre objectif n’est pas qu’il y ait 28 millions de ministres, députés ou juges mais qu’il y ait 28 millions de citoyens qui s’intéresseraient plus à la façon dont l’argent public est dépensé. Aller voir si les lois sont faites pour l’intérêt de tous ou au contraire de quelques-uns. Si les droits fondamentaux sont ou non bafoués… Mais pour cela, il faut que de plus en plus de jeunes acquièrent les capacités et les connaissances qui leur permettraient de participer pleinement à la vie publique. C’est ce que nous nous acharnons à développer.

Votre apport dans la lutte contre la corruption ?
Notre travail dans l’anticorruption relève essentiellement de l’éducation et de l’information. Nous avons commencé avec le projet TsyCoolKoly par la mise en place de signalétiques au sein du Centre hospitalier universitaire Joseph Raseta Befelatanana (CHUJRB). Ensuite, nous avons créé le jeu de société i-TsyCoolKoly et plus tôt dans l’année, nous avons produit le Guide de la lutte contre la corruption pour les jeunes à Madagascar, en malgache et en français. À travers ces différentes actions, nous avons rendu accessibles au grand public le contenu de la loi 2016-020 et les différentes institutions du système anticorruption à Madagascar. On a également permis au public d’identifier les formes de corruption qu’ils peuvent rencontrer au quotidien et de les dénoncer.

Qu’en est-il de l’observatoire parlementaire ?
Le projet Balaky est un observatoire parlementaire et une salle de classe à taille humaine pour mieux connaître les rôles du Parlement et conscientiser les citoyens. Nous avons organisé 20 sessions présentielles d’éducation sur le Parlement auprès de 724 jeunes dans les villes de Fianarantsoa, Antsirabe et Ambatolampy, Toamasina, Fénérive-Est, Ambatondrazaka (CU Ambatondrazaka, Bembary, Ambohitsilaozana), Moramanga, Sambava, Toliara, Morondava et Antananarivo (Ankatso, Centre Arrupe). Ce projet a permis de faciliter la compréhension des travaux parlementaires et mieux cerner les rapports qu’ont les parlementaires avec les citoyens. En ce qui concerne l’éducation au vote, nous avons déjà participé à des missions d’observation électorales et à des campagnes de sensibilisation pour l’inscription dans la liste électorale. Au-delà du simple fait d’inciter les jeunes à aller voter, nous revenons aux bases de la démocratie et de la participation citoyenne.


Propos recueillis par Aina Zo Raberanto

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