« Mahagaga f’eto an-tanindrazako aho nefa, tenin’olon-kafa no takiana mba ho haiko vao mahazo anjara asa hamelomako ankohonana… ». Voniary (nom d’écrivaine) nous cite cet extrait d’un poème de Rado pendant son interview. Pourquoi, en effet, la langue malgache est-elle si peu mise en valeur ? Pour cette traductrice, bloggeuse et enseignante, le problème commence dès le préscolaire jusqu’aux milieux professionnels. Un constat qui pousse Voniary à écrire en malgache, en plus d’autres engagements.
Son choix d’avoir une plume en malgache était un accident, ou presque. Voniary a participé aux concours de nouvelles sur le thème du mariage précoce (« Aza manamabady aloha loatra ») aux Jeux de la Francophonie en 2016. Ce n’est qu’en relisant les règlements qu’elle s’est rendu compte que ce thème n’était valable que pour les textes en malgache, et son texte était en français. Pas question d’abandonner ce thème qui lui tenait à cœur. Alors, pendant deux semaines, Voniary a écrit 50 pages en malgache, et ce fut LA révélation. « J’ai découvert que je pouvais en fait écrire en malgache. D’ailleurs, pourquoi on n’écrit pas tellement dans notre langue ? »
Elle commence alors avec le « Blaogin’i Voniary » cette même année du concours de nouvelles, un des rares blogs en malgache. Au rendez-vous, du développement personnel, mais pas que : divers sujets comme l’économie ou la technologie. « En apprenant le malgache à l’école, on nous enseigne ces écrivains et on a l’impression que c’est une langue limitée uniquement à la littérature. Moi, je développe l’idée qu’on peut utiliser cette langue dans plusieurs domaines ».
Elle prouve ensuite ce pouvoir du malgache en tant qu’écrivaine. Le livre de développement personnel « Raiso an-tanana ny fiainanao » sort en 2020. Puis, elle écrit des livres pour enfants, mais qui ne sont pas des contes : « Ny hafatr’ilay tavoahangy plastika » et « Ny zaridaina keliko » sont des sensibilisations et de l’éducation environnementales destinées aux enfants.
« Ce sont les enfants d’aujourd’hui qui vont vivre dans le monde de demain. Ils doivent savoir beaucoup de choses, surtout l’agriculture, et comment prendre soin de l’environnement. J’écris des livres sur l’environnement qui s’adressent directement à eux, et par la même occasion, je leur transmets la langue malgache ». Avec les enfants, elle fait des animations de lecture. D’après ses observations, leurs lacunes en malgache viennent du fait qu’ils ne lisent pas et n’écoutent pas dans cette langue, que ce soit à l’école ou avec leurs parents.
Là encore, les livres sont d’une aide précieuse. « Les enfants apprennent plus vite en malgache. Dans notre langue, il n’y a pas cette confusion, où par exemple, ils apprennent ‘lapin’ à l’école et ne comprennent pas ‘bitro’ quand ils entendent ce mot à la campagne. D’ailleurs, j’ai refusé d’écrire des livres bilingues, justement pour que les enfants fassent l’effort d’écrire en malgache ».
Pour les adultes, elle travaille la traduction comme un défi, dans différents domaines également. Pour des secteurs comme l’administration, le gouvernement, le tourisme, la mer et le littoral, les dictionnaires spécialisés, les « rakibolan-tsehatra », sont ses meilleurs amis ; contrairement au domaine de la culture, où le côté poétique rend le travail à la fois plus difficile et plus intéressant. Bien qu’elle travaille avec des spécialistes de la langue malgache, Voniary reconnait qu’ils ne peuvent pas valoriser la langue à eux seuls. « C’est un problème multidimensionnel. Même si les auteurs écrivent en malgache, mais que l’État ou les écoles n’incluent pas ces livres dans leur programme, les parents d’élève ne vont jamais les acheter. Il y a aussi cette considération où certaines personnes se pensent supérieures, car elles parlent en français. Nous devons avancer ensemble dans l’utilisation de notre langue ».
Mpihary Razafindrabezandrina
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