Philippe : Capitaine flamme
12 mai 2023 // Métiers & Petits Métiers // 3769 vues // Nc : 160

Cela fait 28 ans que Philippe occupe ce pan de trottoir à Antaninandro. Un espace devenu sien où les bouteilles et les tuyaux à gaz sont désormais indissociables au paysage. Il est chargeur de briquet, un métier qui lui vaut une certaine popularité auprès de ses fidèles en plus d’être son gagne-pain.

Tout juste âgé de 27 ans à l’époque où il a commencé à recharger et réparer des briquets, Philippe fait aujourd’hui partie de ceux qui ont survécu dans le métier, rares dans la capitale. « Avant, j’étais agent de sécurité. Comme je travaillais la nuit, je me tournais juste les pouces pendant la journée, je ne trouvais rien à faire. Forcément j’ai commencé à chercher des activités et je me suis dit pourquoi ne pas réparer des briquets ? Alors j’ai appris avec des amis qui étaient dans le métier. Une fois que j’ai maîtrisé les techniques, je me suis lancé, et ce jusqu’à aujourd’hui. »

Bien qu’il soit le seul à continuer parmi ses compères de l’époque, il est loin de regretter ces années. Ici, les clients affluent, les fumeurs font la queue pour recharger le boîtier à gaz. « J’en recharge 20 par jour au minimum, il n’est pas vraiment question de réparer les briquets, c’est surtout un rechargement de gaz ». Si bien que le quinquagénaire a à peine le temps d’échanger quelques familiarités entre ses gestes devenus des réflexes : ouvrir le bec à gaz, insérer le tuyau et recharger, scruter la pierre du briquet avant de la remplacer.

C’est justement la pierre du briquet qui reste encore un défi pendant ces décennies. « C’est assez difficile quand la pierre du briquet n’est pas disponible, parce que c’est la pierre du briquet qui produit l’étincelle ; même s’il y a du gaz, sans la pierre je ne peux pas travailler, je ne peux rien réparer. » Une logistique d’autant plus difficile à gérer avec son kiosque à journaux. « Est-ce que vous n’avez pas 1000 Ariary ? », lance-t-il en relevant la tête un instant, une réprimande à la dame qui achète un journal avec un gros billet de 20 000 Ariary de si beau matin. Il interrompt la transfusion de gaz et farfouille nerveusement ses poches pour lui rendre la monnaie. Mais il retrouve aussitôt le sourire. « Des cas comme cela il y en a toujours, le petit défaut du charpentier », confie-t-il avec un rire.

Malgré cela, ce métier lui a aussi fait vivre des rencontres chaleureuses. « Ce qui me plaît dans la réparation de briquets c’est que cela m’a fait connaître beaucoup de monde, y compris des personnes comme des fonctionnaires, des policiers et des militaires, j’ai connu des gens intéressants ». Loyal envers ces clients qui étaient aussi des confidents, Philippe garde précieusement leurs anecdotes, des secrets au fil des années. Aujourd’hui âgé de 55 ans, ce père de famille veut continuer à porter haut le flambeau de son métier, un briquet à la fois.

Propos recueillis par  Mpihary Mahefa

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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