Noro Rajaoson « Ma peinture est spontanée et intuitive »
9 mars 2023 // Arts Plastiques // 4818 vues // Nc : 158

Une artiste aux mille couleurs. C’est ainsi que l’ont peut définir l’artiste peintre Noro Rajaoson, spécialisée dans la peinture à l’huile et qui a réalisé la couverture du magazine de ce mois de mars. Son art l’enrichit et lui donne une sensation de liberté. Les voyages, les musées, les rencontres font partie de ces plus grandes sources d’inspiration.

La peinture à l’huile, votre spécialité ?
J’ai fait un master d’études anglo-Irlandaises (Paris Sorbonne Nouvelle) et je suis également titulaire d’un CAPES d’anglais. J’ai commencé la peinture à l’huile en 2006 suite à la rencontre avec un professeur formidable, Didier Dessus, qui a tout de suite décelé à l’époque mon rapport particulier avec les couleurs vives et éclatantes. J’ai suivi six années de cours avec lui. J’ai également pris des cours du soir sur l’histoire de l’art et la peinture américaine avec Marlène Gossmann, une historienne de l’art et docteure en histoire de l’art contemporain.  Elle est également enseignante aux Beaux-Arts de Dijon.

Justement, les couleurs et les formes géométriques sont votre signature ?
J’aime l’association de couleurs et de formes géométriques. Pour moi, dans mes tableaux, les couleurs sont comme des morceaux de puzzle, à un moment donné, les couleurs vont s’emboiter les unes dans les autres. Je sais reconnaître le moment où ma peinture est terminée. On a besoin de couleurs pour égayer nos vies, pour avoir le contrôle face à la morosité de notre environnement. En ce moment on a quand même de quoi s’inquiéter n’est-ce pas ? La guerre en Ukraine, les ouragans à Madagascar, les tremblements de terre en Turquie et en Syrie,  cette inflation galopante que ce soit à Madagascar ou en France. Mon univers tout en couleurs me permet de rester forte face aux évènements extérieurs que je ne maitrise pas ! Mon style de peinture, c’est indéniablement une peinture spontanée et intuitive. De l’art abstrait avec un mélange de fauvisme.

La rêveuse dans les étoiles
100 x 50cm, huile sur toile, 2023
Ma théière rouge
46 x 33cm, huile sur toile,2022

Comment se déroule votre processus de création ?
Je suis toujours étonnée de partir de ma toile blanche et d’arriver à un résultat Je fais un croquis. Auparavant, je prépare mes toiles au gesso et j’aime particulièrement travailler sur des toiles de lin. Mon inspiration vient de mes expériences personnelles, de mes humeurs du jour ou de mes visites de musées. Encore un conseil de mon professeur, Didier Dessus, « Quand vous n’avez pas le temps allez au musée et exercez votre œil ».  J’adore arpenter les musées à Paris, en décembre 2022 j’ai vu l’exposition Monet-Mitchell à la Fondation Louis Vuitton. Je prends toujours le temps de découvrir un musée ou deux lors de mes voyages. Il y a également cette notion d’intemporalité quand je me retrouve devant les tableaux des grands maîtres. Comment ne pas être fascinée par ces célèbres œuvres qui ont traversé le temps ? J’aime tout particulièrement le village d’artistes de Pont-Aven en Bretagne où on peut sentir la présence de Gauguin à chaque coin de rue.  L’été dernier, j’ai découvert avec plaisir le musée Magritte à Bruxelles en Belgique.  Et lors de mon dernier voyage à Madagascar en août 2022, j’ai découvert la Fondation H et les œuvres d’un artiste malgache talentueux Zouba K, j’étais impressionnée par l’originalité de ses sculptures.

Madagascar nourrit également votre créativité ?
Je pense que Madagascar joue un rôle particulier dans mon art. J’ai toujours dans ma tête le souvenir des marchés du Zoma, je me rappelle encore toutes ces explosions de couleurs au marché en repensant aux étals de fleurs et de fruits. Lors de mes deux expositions collectives à Paris qui étaient organisées par l’ambassade de Madagascar, j’ai créé spécialement trois tableaux sur la culture malgache. Les souvenirs de mon enfance (60 x 60 cm), Le coeur en exil (50 x 40cm) avec la jeune femme près d’un baobab. Et le tableau intitulé Aux rythmes du Valiha (41 x 33cm). D’ailleurs les deux tableaux, le cœur en exil et les rythmes de Valiha sont toujours exposés à l’ambassade de Madagascar jusqu’à la fin du mois de mars à l’initiative de Madame l’ambassadrice, Mme Rajohnson Rabeza.

Turbulences
61 x 50cm, huile sur toile, 2023
Le cœur en exil
50 x 40cm, huile sur toile, 2022
Les souvenirs de mon enfance
60 x 60cm, huilesur toile, 2022

La présence de la femme semble récurrente dans vos œuvres, pour quelles raisons ?
Vous avez tout à fait raison, je suis très sensible à l’évolution de la cause des femmes dans notre société. J’aime la notion de sororité.  Je suis entourée de femmes que je respecte et que j’admire. Ma mère est une femme forte. J’ai commencé ma série de personnages féminins pendant le confinement, aujourd’hui j’ai réalisé au moins 7 portraits de femmes et je continue cette série.  D’abord, j’ai peint les femmes de dos. Depuis l’année dernière, je commence à leur donner un visage, apparemment mes portraits ont évolué depuis les deux dernières années.

Vous délivrez également d’autres messages, plus personnels…
Cette question est complexe. Je veux faire passer beaucoup de messages à travers mes œuvres. Il faut s’accorder du temps pour soi. Peindre me donne cette liberté de me connecter à mon monde intérieur. La devise carpe diem me semble importante, il faut vivre le moment présent parce que nous pouvons perdre tout ce qu’on possède de précieux du jour au lendemain. Mes œuvres témoignent mon histoire personnelle. Il y a toujours un lien dans mes tableaux, les cercles imparfaits. La vie est faite de hauts et de bas, d’où cette quête perpétuelle de sérénité.  Il est essentiel de trouver une passion dans sa vie. Pour moi, c’est la peinture !

Quels sont vos projets ?
Mon tableau Ma théière rouge est exposé à la galerie Espace Ysmailoff dans le 15e à Paris  jusqu'à la fin du mois de mars. J’ai aussi accepté de participer à une exposition collective à Beaune en octobre 2023. J’avais envie de revenir dans ma région pour une exposition cette année. J’attends la confirmation pour mes expositions à Paris à partir de juin 2023. Je fais une petite pause dans les expositions jusqu’au mois de mai. L’artiste a besoin de s’isoler pour créer de nouveaux tableaux. J’ai le projet d’avoir mon atelier d’artiste prochainement. Je travaille en collaboration avec la boutique Lisy Art Gallery à  Antananarivo depuis décembre. Je suis contente qu’ils aient choisi mes totes bags pour leur boutique.  J’ai aussi une série limitée de mugs et de tote bags qu’on peut avoir sur commande. Mes tableaux  sont représentés sur ces produits dérivés. J’aimerais collaborer avec la Fondation H à Antananarivo cette année. Et je souhaiterais également exposer mes tableaux à l’hôtel Radisson Tamboho dans la capitale.

Propos recueillis par Aina Zo Raberanto

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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