Madame Dedamas : Reine non-conformiste
7 juin 2025 // Arts de la scène // 3742 vues // Nc : 185

Sous ses perruques flamboyantes et son eyeliner dramatique, Madame Dedamas ne se contente pas d’enfiler des habits de scène : elle incarne une figure totale, un personnage de théâtre queer aux mille reflets. À Antananarivo, cette dragqueen malgache façonne une œuvre à part entière, entre mode, chant, performance et résistance joyeuse.

Talons vertigineux, corset façon Botticelli remixé par Lady Gaga, avec un maquillage plus baroque que discret et perruque comme un clin d’œil lourd de sequins à Cher. A Tana, chaque apparition sur scène de ce personnage haut en couleur devient un événement. On le connaît sous le nom de Madame Dedamas. Elle performe mode, théâtre, chant, danse, subversion. Sur scène, rien n’est laissé au hasard : le flirt, le burlesque, les chansons torrides et les ballades pleines de spleen forment un mélange aussi électrique que raffiné.

« Avec de solides backgrounds en comédie musicale, j’interprète des standards de Broadway. Je fais également du lip-sync, du voguying en guise de clin d’œil aux icônes queer. Je prévoie aussi tenter un reveal, comme Sasha Velour qui avait planqué des pétales de rose partout sur elle. Ce genre de surprise, ça vous arrache une larme en plein strass », lance-t-elle, non sans fierté.

Il y a encore deux ans, personne ne connaissait Madame Dedamas. Quand on lui demande d’où vient ce personnage qui marque tant les esprits aujourd’hui, elle ressort instantanément ce propos de RuPaul Charles, qui dit « On naît nu.e.s, le reste, c’est du drag. » Cette phrase fut une épiphanie, un déclic, pour Madame Dedamas. « C’était il y a deux ans, devant un écran où s’affrontaient perruques et contourings survolés d’une ironie bien huilée », se rappelle-t-elle. Depuis, elle a troqué l’anonymat sage contre la flamboyance maîtrisée : s’habiller, oui, mais comme on prend un rôle à bras-le-corps.

Quant à son nom, ce n’est pas tombé du ciel. La rose de Damas, fleur capiteuse et ténébreuse, évoque ce goût affirmé pour le gothique grotesque, un théâtre des excès où le ridicule tutoie le sublime. Et cette particule aristocratique, c’est le clin d’œil assumé à une certaine idée du glamour français, celui qui flirte avec le kitsch sans pour autant tomber dedans. Le style de Madame Dedamas ? « Inclassable », répond-elle sobrement. Elle le réinvente à chaque show, pioche ici dans l’élégance lugubre de Morticia Addams, là dans le cabotinage des méchantes de télénovelas, un jour en diva de Broadway, un autre en créature cyber des années 90.

Madame Dedamas se montre anticonformiste et provocatrice. « C’est elle qui me possède quand elle apparaît. Moi, je reste dans l’ombre. Dans une société comme la nôtre, qui griffe tout ce qui dépasse, l’anonymat, c’est un peu mon armure », confie-t-elle. En scène, elle devient une autre version de soi, plus féroce, plus libre : « Le drag, c’est un exutoire qui transgresse le genre. C’est comme si je m’autorisais à être la mère que je n’ai jamais eue, ou que j’aurais rêvé d’avoir. Une guide, une diva. »

Avec véhémence, elle se positionne comme porte étendard d’un réel mouvement. Elle veut faire chacun de ses spectacles une vraie bouffée d’oxygène, un rappel. En effet, elle connaît son histoire, celle du drag, des soulèvements de Stonewall à New York aux défilés de Pride devenus des rituels de résistance. Elle n’oublie rien. « Je suis admirative des militant.e.s qui s’exposent et qui portent des causes à bout de bras. Moi, j’ai choisi l’euphorie comme arme. Créer un espace de fête, c’est déjà une réponse politique. Mon drag est une bulle de joie pour tous ceux que le monde blesse ». Et ce refuge, il est vital.

Mpihary Razafindrabezandrina

Instagram : madame_dedamas

Laisser un commentaire
no comment
no comment - Cosmétique : MartiDerm débarque à Madagascar

Lire

8 décembre 2025

Cosmétique : MartiDerm débarque à Madagascar

La marque espagnole MartiDerm débarque officiellement à Madagascar ce samedi 6 décembre, avec un lancement organisé au Novotel Alarobia par son distri...

Edito
no comment - Shows devant !

Lire le magazine

Shows devant !

Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

No comment Tv

Making of shooting mode – Novembre 2025 – NC 190

Retrouvez le making of shooting mode du 𝗻𝗼 𝗰𝗼𝗺𝗺𝗲𝗻𝘁® magazine, édition novembre 2025 - NC 190
Prise de vue : no comment® studio 
Collaborations : Tanossi – Via Milano mg – HAYA Madagascar - Akomba Garment MG 
Make up : Réalisé par Samchia 
Modèles : Lana, Judicaël, Catuchia, Faravavy, Tojo, Mitia, Santien, Mampionona 
Photos : Andriamparany Ranaivozanany

Focus

November Numérique

November Numérique à l'IFM

no comment - November Numérique

Voir