Eja est un adolescent passionné de sport extrême et, du haut de ses 13 ans, c’est surtout un héros. Vaki-Beka raconte son histoire et celle du lac Tritriva, imaginées et écrites par Zo Tojomalala et Zo Rojomalala (R), aidés aux recherches par Solofonantenaina Mika Randria (M), le tout dessiné par Aerosniff (A). Un titre inspiré du Vakinankaratra pour « Vaki », et « beka » pour son vélo. Disponible dans les librairies depuis fin 2024, Vaki-Beka est le premier Mangano de Madagascar.
D’où vous est venue l’idée du mangano ?
R : L’idée vient de mon frère, Zo Tojomalala. Il a toujours été fan de manga et parallèlement, j’ai toujours eu énormément d’imagination - j’ai commencé à écrire de courtes histoires à l’âge de neuf ans -. En 2023, il m’a proposé de faire un manga et nous avons écrit le scénario ensemble. Le but à ce moment-là était d’avoir un héros malgache. De manière générale, on se réfère aux héros étrangers. Nous nous sommes dit que ça serait une bonne idée d’en créer un auquel les enfants malgaches puissent s'identifier. Bien sûr, nous avons fait des recherches sur les histoires que nous racontons dans le livre, nous avons travaillé chaque personnage, le sortir nous a donc pris environ 15 mois.
M : Dans le fond, nous nous sommes demandé : « Pourquoi les jeunes malgaches n’ont plus une représentation sociale de ce qu’est un héros ? » Ils n’ont pas de repère. Justement, le « mangano » est une combinaison de manga et de « angano » (conte) : des contes que Zo Rojomalala et Zo Tojomalala ont créés et dont le contexte s’inspire de faits réels. Dans Vaki-Beka, on y parle par exemple de la préhistoire malgache, des savoir-faire autochtones et des pratiques mystiques cachées que la nouvelle génération devrait connaître. C’est cette valeur transculturelle qu’on cherche à faire passer à travers ce livre, l’idée de vulgariser l’identité culturelle malgache. Vaki-Beka raconte l’histoire de personnes venant du Sud-Est et de la région Vakinankaratra. Nous voulons montrer cette interculturalité, parce que cette diversité est une richesse.
Un héros malgache ?
A : Il y a plusieurs genres de mangas et nous sommes entrés dans la catégorie des Shonen, à destination des adolescents. En général, les adolescents aiment les adolescents qui leur ressemblent : Naruto, Goku ou Luffy… Et c’est là qu’est venue l’idée de créer un héros adolescent qui sera un représentant des Malgaches et auquel ceux-ci vont s’identifier. Mais une fois de plus, les recherches ont été la base, le format est un moyen de les montrer.
M : Le héros est un gamin marginal, mais pas dans le sens péjoratif. C’est un enfant qui traîne un peu partout, mais comme c’est un héros, il a cette sensibilité, cette clairvoyance, cette claire audience, ce clair auditif qu’il a acquis grâce à sa relation avec la nature. Bien qu’il n’ait que 13 ans, il fait des choses qu’un jeune de son âge ne ferait pas, et cela est dû à cette relation qu’il a avec plusieurs entités qui forgent sa personnalité en tant que héros. Il a une valeur en plus parce qu’il s’accroche aux connaissances et à la sagesse locale, tout en maîtrisant ce qui vient de l’étranger : c’est cette personnalité qu’on essaye de faire passer.
Vaki-beka, une production de Hay Project ?
R : Oui, c’est Hay Project qui a produit Vaki-Beka. C’est un projet fondé par mon frère Zo Tojomalala et qui vise à améliorer l’éducation à Madagascar. Il a commencé par une plateforme de soutien scolaire en ligne. Plus tard, des branches se sont formées, dont le Mangano – auparavant « Drawing » – et une autre où on produit des vidéos culturelles et des documentaires avec des interviews et des descentes. Jusque-là, nous essayons toujours de parler de la culture malgache, car elle commence un peu à se perdre et parfois, le public ne voit que son côté péjoratif. Justement, dans le Mangano nous avons essayé de montrer ce côté mélioratif de la culture malgache. Sans spoiler, nous avons essayé de mettre en avant le bon côté de personnages malgaches qu’on aurait imaginés mauvais. Sinon, l’histoire a été modernisée pour avoir une trame, un héros et des faits de notre époque. Nous avons choisi une histoire autour du lac Tritriva parce qu’il garde un mystère qui n’a pas été résolu jusqu’à ce jour. Il est possible que nous fassions d’autres histoires, parce qu’au final on a des tas de héros qu’on veut exploiter.
M : Chez Hay Project, nous prévoyons de sortir des vidéos et des documentaires. Dans le Mangano, nous allons continuer à parler de héros : notre raison d’être est de forger la génération actuelle. Si les autres pays ont Marvel, nous pouvons également avoir des personnages qui nous permettent de réveiller une mémoire collective. Le livre est disponible dans les librairies de la capitale, sur commande dans les régions et en ligne. Nous sommes en train de finaliser le tome deux et d’écrire les prochains tomes, en espérant le partager partout dans le monde, d’autant que le manga est un support déjà mondialisé.
Propos recueillis par Rova Andriantsileferintsoa
Contact : hayproject.mg