Une expédition de la Zoological State Collection Munich (ZSM) a permis de retrouver le caméléon Voeltzkow qu’on avait perdu de vue depuis 1913 ! Cette espèce aux mille couleurs appartient aux quelque 500 vertébrés terrestres gravement menacés qui pourraient disparaître d'ici une vingtaine d'années.
Il se cachait bien le coquinou, mais on a fini par le retrouver ! Décrit pour la première fois en 1893 par Alfred Voeltzkow, un éminent explorateur du nord-ouest de Madagascar, ce caméléon (Furcifer voeltzkowi) faisait partie depuis plus d’un siècle des 25 espèces les plus recherchées par Global Wildlife Conservation. Pas de quoi faire intervenir Interpol, mais quand même ! Sa redécouverte a été annoncée en octobre dernier dans la revue scientifique Salamandra, au cours d’une expédition qui a eu lieu en avril 2018 dans le nord-ouest de Madagascar, menée par une équipe de chercheurs allemands et malgaches.
L’opération de sauvetage a permis de mettre la main sur une femelle Voeltzkow dont on ignorait tout jusque-là de la couleur et de la morphologie. « On a appris que les femelles se distinguent par leurs couleurs brillantes - violet, orange, rouge, vert, noir et blanc - avec des motifs saillants. Elles peuvent changer de couleur en fonction de leur humeur. Elles sont particulièrement colorées lorsqu'elles rencontrent des mâles ou sont enceintes », explique Dr Frank Glaw, chef du département des vertébrés à la Zoologische Staatssammlung München (Muséum de Munich), qui a dirigé l’expédition.
Les chercheurs pensent que Furcifer voeltzkowi ne vit que quelques mois pendant la saison des pluies. « Il faut donc être au bon endroit et au bon moment pour pouvoir le détecter. Et ce n'est pas si simple pendant la saison des pluies, car de nombreuses routes sont rendues inaccessibles. C'est l'une des raisons pour lesquelles ce reptile a été inobservé pendant si longtemps. » Trois mâles et près de quinze femelles ont été découverts par les scientifiques. Angeluc Razafimanantsoa, un guide professionnel de la Montagne d’Ambre, a été le premier à les repérer. « Nos efforts ont été infructueux pendant la majeure partie du voyage, nous le cherchions là où nous pensions qu'il devait être. C'était vraiment frustrant, mais les derniers jours du voyage nous ont apporté une fin inespérée. »
Jusque-là, les scientifiques pensaient que le caméléon Voeltzkow avait une vie similaire à son proche parent, le caméléon de Labord (Furcifer labordi), une espèce qui ne vit que quatre ou cinq mois. Mais on sait aujourd’hui qu’ils sont génétiquement différents et que Voeltzkow est bien une espèce à part entière. Il est donc l’une des 96 espèces de caméléons endémiques de Madagascar, même si les feux de brousse et la déforestation mettent un gros point d’interrogation sur leur avenir. Si ce caméléon n’est pas présentement menacé d’extinction, son habitat commence à se réduire en raison des nombreuses forêts sèches abattues. « Certains habitats potentiels du caméléon Voeltzkow sont déjà protégés dans les réserves naturelles. D’autres mesures de conservation seront prises basées sur des recherches futures quant à la distribution géographique de l’espèce », précise Frank Glaw.
Dans la foulée, Global Wildlife Conservation a confirmé la redécouverte de cinq autres espèces sur sa liste des 25 espèces perdues les plus recherchées, notamment la salamandre grimpante de Jackson au Guatemala, l'abeille géante de Wallace, le chevrotain à dos argenté au Vietnam et le sengi somalien à Djibouti cette année même. En revanche, toujours pas de nouvelles du soldat Ryan…
Page réalisée par Aina Zo Raberanto