Danseur chevronné, chanteur talentueux et percussionniste de talent, José Njiva est un artiste passionné qui ne cesse de porter haut la culture de l’océan Indien à travers le monde. Sa carrière, il l’a débuté il y a 21 ans de cela. Il a appris des meilleurs dans le domaine, aujourd’hui, il fait partie des icônes du paysage artistique malagasy. En 2022, il a lancé son propre groupe « Njiva Trio ».
Dès son jeune âge, il a toujours aimé la danse et la musique. À l’adolescence, il était scout et membre d’une chorale, ce qui fait qu’il a baigné dedans très tôt. « Par contre, à cette époque, je n’avais pas encore envisagé d’en faire une carrière professionnelle. Le déclic s’est produit lorsque j’avais décroché mon Master en gestion et comptabilité. J’avais constaté que manipuler des chiffres sur un ordinateur n’était pas la chose que je voulais faire de ma vie. Ce qui me rendait heureux, c’était de danser et de chanter. À travers eux, j’exprime pleinement mes émotions. Quand je suis triste, j’évacue mon chagrin et mon stress par le chant et la danse. Quand je suis heureux, je le fais aussi. Je ne le fais pas pour de l’argent, car c’est avant tout une passion. Il m’arrive de danser dans la rue quand j’entends de la musique ou encore au supermarché. Parfois, les gens qui m’accompagnent en sont vexés » dit-il en riant.
Il a commencé à entrer dans le monde professionnel en 2000 à travers la danse par le biais d’un atelier dénommé « Ankisôma ». Une formation dans laquelle ils ont fait appel à des chorégraphes. C’était un heureux hasard ou plutôt l’appel du destin pour le jeune Njiva. « J’étais là par accident, car, au départ, c’est un ami à moi qui s’était inscrit pour participer à l’atelier. Malheureusement, il n’a pas pu y assister et m’a donc proposé d’y aller à sa place. J’avais donc pris l’identité d’une autre personne ! Là, je me suis formé en danse contemporaine durant une semaine sous les conseils avisés d’Andriamoratsiresy du groupe RARY. À la fin de la formation, il m’a fait part d’un projet de danse et m’a demandé si je voulais y participer, car, selon lui, j’avais de bons mouvements et que je pouvais percer dans cet art. J’étais gêné de lui annoncer la situation dans laquelle j’étais arrivé là. Heureusement, Andriamoratsiresy a été bienveillant à mon égard et m’a permis d’intégrer les cours de danse contemporaine du groupe Rary. J’y suis resté un an. »
En 2003, un chorégraphe mauricien est venu à Madagascar à la recherche de 4 danseurs. Sans hésiter, il a passé les auditions et a été pris. L’aventure a ensuite continué à l’île Maurice où il s’est formé au « katak », une danse classique indienne. À ce sujet, Njiva déclare : « Fait surprenant, cette danse avait quelques similitudes aux mouvements des danses malagasy, surtout au niveau des mains et des pieds. De là m’est venue l’inspiration de combiner les deux. » Après deux ans et demi, un groupe réunionnais dénommé Talipot est venu à son tour à l’île Maurice afin de faire passer des auditions. Il a également été pris et a ensuite poursuivi son épopée vers l’île de la Réunion. « Là-bas, c’était un tout autre niveau, car on nous initiait au “physical theater” ou théâtre physique. Ça consistait à faire du théâtre, à chanter puis à danser. Je suis resté 7 ans avec ce groupe et ça m’a grandement aidé en tant qu’artiste. J’en garde de mémorables souvenirs comme nos tournées en Afrique, en Martinique ainsi que notre participation au festival d’Avignon, en France. »
Son passage dans la compagnie Talipot lui a aussi permis d’assister à différents stages et workshop dans lesquels il a pu rencontrer divers artistes et danseurs professionnels tels que l’illustre Sud-Africain, Vincent Manchuwé. « À chaque fois qu’on visitait un pays, il y avait toujours des danseurs et musiciens professionnels qui nous invitaient à travailler avec eux. Ces partages d’expériences m’ont incité à me tourner vers le monde de la musique. De plus, avec l’âge avancé, ça devenait de plus en plus compliqué d’enchaîner les performances. Allier ces deux domaines a été le mélange parfait pour poursuivre ma carrière. De nos jours, je fais de la danse contemporaine, la danse traditionnelle, la danse africaine, latino, salsa, bachata. En termes de musique, je suis personnellement attaché à la musique traditionnelle malagasy. Je m’inspire des diverses richesses musicales que nous avons du nord au sud, de l’est à l’ouest et je les adapte à différentes sauces. Ma mission consiste à faire découvrir la musique malagasy au reste du monde. » Aujourd’hui, il accompagne divers groupes et artistes malagasy en tant que percussionniste. « J’ai collaboré avec Jeahy, Gadyak, Hajazz ou encore Dago Roots. Je suis intermittent du spectacle et je participe à divers ateliers dans des crèches, les hôpitaux et même dans les prisons. » Il échange énormément aussi avec les artistes locaux autour de ses passions. « Récemment, j’ai participé à un festival de danse “Evasion Dance” qui s’est déroulé du 7 au 14 juillet 2023. » Pour Njiva, l’art est avant tout un partage et le fait qu’il soit un danseur ne l’empêche pas d’aider ou d’acquérir des conseils de la part d’autres musiciens. « Vous savez, la danse et la musique, c’est un peu comme l’eau et le riz. Ils sont indissociables. De plus, le show-business d’aujourd’hui a besoin de cette complémentarité. Le ressenti du public est différent entre un guitariste qui joue seul sa partition et un guitariste accompagné par les mouvements d’un danseur. »
Malgré toute l’expérience et le savoir qu’il a acquis au fil des années, il ne se repose jamais sur ses lauriers et continue d’être un disciple dans le métier. « Je suis un éternel apprenti, car la vie est un éternel apprentissage. En ce moment, j’envisage de participer à des workshops de Krump, une danse née dans les années 2000 aux États-Unis, et au Street Jazz. Ce dernier est un style de danse plus libre et plus expressif que le jazz classique. » À travers sa musique et sa danse, il essaye de faire passer divers messages. « Il y a des chansons que j’ai produit qui parlent de la pauvreté à Madagascar, d’autres luttent en faveur de la préservation de l’environnement. »
Lorsqu’on a un objectif de vie, dit-il, on se donne tous les moyens nécessaires pour le réaliser. Depuis qu’il a décidé d’arrêter les études pour se consacrer à l’art, il en vit pleinement. « Je ne suis pas devenu riche, mais je gagne assez pour pouvoir nourrir ma famille et assumer toutes les charges qui m’incombent. D’ailleurs, si je me suis cantonné à mes études, je n’aurai pas fait le tour du monde. Il est vrai que dans notre pays, c’est difficile de pouvoir vivre de sa passion surtout si c’est en rapport avec le divertissement. Il faut savoir continuer malgré les difficultés et saisir chaque occasion qui pointe son nez pour réaliser ses rêves. »
Propos recueillis par Girard Ravelomanantsoa
Contact José Njiva : +261 38 94 960 20