Christian Andriambelo : Du lifting pour œuvres d’art
6 novembre 2024 // Arts Plastiques // 3573 vues // Nc : 178

Christian Randriambelo parle de « tableaux marary » (tableaux malades) pour désigner ceux qu’il restaure. Aussi délicat qu’une chirurgie cardiaque, son métier bat au rythme de la précision scientifique et l’amour de l’art.

De quoi peut souffrir un tableau ?
Déjà, la poussière peut l’assombrir. Les couleurs peuvent aussi changer, par exemple, le peintre a peint un ciel bleu ; ensuite, il l’a verni, mais le vernis jaunit en vieillissant, se superposant avec le bleu de ce ciel, le jaune donne du vert, ce qui fait qu’on a un ciel vert après trois siècles (rires). Dans ce cas, il faut enlever le vernis. Le climat tropical est aussi très nocif : au printemps, le tableau crame carrément et se gonfle, en hiver, il gèle et se raidit, d’ailleurs le vernis est là pour atténuer ces grands écarts thermiques. Les tableaux peuvent aussi se déchirer.

La restauration, toute une science ?
Dès ma première année d’études, on a abordé la physique-chimie et l’histoire de l’art. Puis on étudie la connaissance des matériaux et leurs différentes réactivités. Je dois bien comprendre quelles matières sont utilisées, bien étudier la réactivité de chacune d’elles : deux matières peuvent réagir très différemment avec l’eau par exemple. Il faut faire très attention pour ne pas se trouver avec de la peinture qui gonfle. Il faut considérer les produits chimiques, la souplesse, la réversibilité au cas où on fait une erreur. On ne rénove pas, on ne renouvelle rien : on conserve l’aspect originel du tableau, avec toutes les matières qui s’y trouvent.

Vos patients favoris ?
Certains sont accrochés au Rova, le Palais de la Reine. Ils datent du temps de la royauté, soit au XIXème siècle. D’autres, plus récents, sont du XXème siècle et, même des années 2000. Pour les tableaux plus récents, les couleurs sont déjà préfabriquées, c’est-à-dire que le peintre a juste acheté des tubes de couleur. Ce n’est pas le cas pour les plus vieux : pour obtenir une couleur, ils ont cherché des matières, les ont broyées comme de la farine, puis les ont mélangées avec de l’huile de lin.

Les opérations les plus critiques ?
Je pense que j’ai restauré cinq tableaux de grande valeur, vous savez le genre de tableaux qui font trembler les mains ! On n’ose pas les toucher tout de suite. C’étaient des tableaux des disciples de grands maîtres. Après toute la partie réflexion, je me lance enfin, et je suis satisfait du résultat après avoir eu la peur de ma vie, mais quelque part, c’est ce que j’aime dans ce travail (rires). Il faut savoir qu’une restauration peut durer de quelques jours à plusieurs années selon l’ampleur du dégât. A Madagascar, les descendants des anciens nobles ont aussi des tableaux coûteux.

Qui sont vos clients ?
Il y a des commandes institutionnelles, comme le travail qu’on faisait avec le ministère de la Culture et des restaurateurs étrangers, travail qui ne se fait plus du fait du changement de leurs priorités peut-être. Pour les particuliers, il y a ceux qui partent à l’étranger et font le tour des marchés aux puces, ou les antiquités, il peut y avoir des tableaux qui remontent au XVIIème siècle, mais seuls les connaisseurs prennent compte de leur valeur. On peut les acheter à bas prix, mais la valeur augmente après la restauration.

Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina

Téléphone : 0344852764

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Il fut une époque où parler de « cinéma malgache » provoquait un sourire poli, celui qu’on réserve aux rêves un peu fous. D’autres se moquaient ouvertement de ces productions de niveau abécédaire. Désormais, ces points de vue moqueurs s’effacent pour laisser place à l’admiration. Les images sont plus nettes, les scénarios plus affûtés, les voix plus assurées. On sent cette montée en gamme, cette fierté tranquille d’un art qui prend enfin confiance en lui. Et c’est beau à voir — comme une pellicule qu’on aurait enfin sortie du grenier pour la projeter au grand jour.
Certes, des défis restent à relever, notamment en matière d’infrastructures, de financements, de formation… mais le vent tourne. Et ce vent-là sent la créativité, la sueur, et un peu de ce grain de folie propre à nos conteurs. La Grande-île ne veut plus être simple figurant dans l’histoire du septième art. Madagascar s’installe, doucement mais sûrement, dans le rôle principal. Au fond, ce renouveau n’est pas qu’un phénomène culturel. C’est une déclaration : ici aussi, on sait raconter. Et mieux encore, le faire rêver.

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