Artizaho : « On donne aux artisans les moyens de grandir professionnellement et personnellement »
31 mars 2025 // Entreprendre // 7493 vues // Nc : 183

À travers des séries d’ateliers ouverts au public, Artizaho met en contact les artisans avec un public. En quoi cette méthode de promotion favorise-t-elle le secteur de l’artisanat ? Réponse avec Miora Rajaonary (née Ratsimanohatra), Fondatrice & Business Developer.

À partir de quel constat avez-vous créé Artizaho ?
Artizaho a été créé face à un constat alarmant : l’isolement et le manque d’opportunités pour les artisans malgaches. Gardiens de savoir-faire ancestraux, créateurs de pièces uniques, ils luttent pour vivre de leur art, pris au piège de défis multiples.

©photo : Artizaho

L’éloignement, le manque de ressources, la concurrence des importations et l’absence de plateformes modernes les relèguent à la précarité. Environ 75 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, dont de nombreux artisans et agriculteurs. Seuls 20 % vendent au-delà de leur région, et le secteur informel, où ils évoluent, représente 80 % de l’emploi, souvent dans la précarité. Face à cette urgence, Artizaho se veut une solution, une passerelle pour donner visibilité, formation et soutien personnalisé, afin que leur talent trouve enfin sa juste valeur.

Quels sont les blocages qui empêchent les artisans malgaches de rencontrer une clientèle plus large ?
Malgré la richesse de l’artisanat malgache, plusieurs freins limitent son développement. Il y a un manque de visibilité et de promotion : beaucoup d’artisans n’ont pas les outils, connaissances et ressources pour faire connaître leur travail et restent cantonnés à un marché restreint. Il y a des défis liés à la qualité et aux standards internationaux : l’authenticité est une force, mais elle doit s’accompagner d’un travail sur la finition, le packaging et la capacité à répondre aux attentes d’une clientèle élargie.

Concernant la créativité, les artisans, isolés, ont peu d’opportunités d’échanges et peinent à renouveler leurs inspirations, ce qui conduit souvent à une reproduction des mêmes modèles. Il y a aussi un facteur culturel : beaucoup restent dans leur zone de confort par timidité, traditions ancrées ou barrière de la langue, ce qui les limite.

©photo : Artizaho

Vos initiatives ont créé 13 emplois directs et indirects en 2024, de quelle façon une initiative comme Artizaho participe à créer de l’emploi ?
Artizaho s’engage activement dans la création d’emplois et le soutien des artisans malgaches avec une approche intégrée et durable. Nous leur offrons une visibilité en ligne, élargissant leurs débouchés, augmentant leurs revenus et favorisant leur développement. Cette démarche lutte contre la pauvreté et stimule l’économie, en aidant les artisans à vivre dignement de leur travail. En soutenant leurs ateliers, nous contribuons directement à la création d’emplois durables, incluant assistants, fournisseurs et animateurs d’ateliers. Ainsi, Artizaho crée une dynamique stable, favorisant des emplois et un avenir prospère pour les artisans et leurs communautés. L’impact d’Artizaho se mesure aux réussites de chaque artisan. Parmi nos fiertés : un artisan en papier antemoro qui a pu achever la construction de sa maison, une céramiste qui a élargi la vision de sa marque, et un peintre qui, grâce à une meilleure visibilité, vend davantage et reçoit des commandes personnalisées.

Ces parcours illustrent la valeur d’un accompagnement humain et la mise en avant du patrimoine malgache.

Quel est le potentiel du marché de l’exportation des produits artisanaux malgaches ?
Le marché de l’exportation des produits artisanaux de Madagascar regorge de potentiel. L’artisanat malgache, riche de traditions ancestrales, propose des produits uniques et authentiques qui séduisent de plus en plus les marchés internationaux.

©photo : Artizaho

Par ailleurs, la demande croissante pour des produits éthiques et durables, respectueux de l’environnement et des savoir-faire locaux, représente une grande opportunité pour nos artisans. Cependant, pour exploiter pleinement ce potentiel, plusieurs défis doivent être relevés, mais en investissant dans la formation, l’accompagnement et la promotion de l’artisanat malgache, ce secteur peut devenir un véritable moteur de développement économique et social pour Madagascar.

Quels sont les défis à relever pour débloquer ce potentiel ?
Pour que l’artisanat occupe une place centrale dans l’économie malgache, plusieurs actions doivent être mises en place. Il faut des formations régulières pour renforcer la qualité et la gestion des activités artisanales. La création de labels de qualité et de certifications pour rassurer les acheteurs et structurer l’offre. L’accès facilité au financement afin que les artisans puissent investir dans des équipements de meilleure qualité et élargir leur production. Et enfin, éduquer et sensibiliser le public local à la véritable valeur des produits artisanaux.

Il est important de cesser de marchander constamment, car ces métiers demandent du temps, de la patience, une grande créativité, du travail méticuleux et de la passion. Nous encourageons chacun à venir découvrir ce travail de près, lors de nos ateliers. Beaucoup de participants ne prennent conscience de l’engagement nécessaire que lorsqu’ils se mettent à la place de l’artisan, même pour quelques heures.

Le gouvernement ambitionne de faire de l’artisanat le premier pourvoyeur d’emplois à Madagascar d’ici 10 ans. Quels sont l’importance et le rôle d’une structure comme Artizaho pour atteindre cet objectif ?
Pour atteindre cet objectif, il faut des structures capables d’accompagner les artisans dans leur montée en compétences et leur mise en réseau. Artizaho joue un rôle clé en offrant une vitrine aux artisans à travers nos ateliers et nos collaborations. En créant une communauté qui encourage l’échange, l’apprentissage et la transmission des savoirs. En développant des opportunités économiques qui rendent l’artisanat plus attractif et rentable. Nous contribuons ainsi à transformer l’artisanat en un véritable levier d’emploi et de développement durable.

Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina

https://artizaho.com

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Décembre arrive et, comme chaque année, Madagascar se réveille culturellement.
Soudainement, les salles de spectacle se remplissent, les artistes sortent du bois, les concerts s’enchaînent. C’est la saison des festivités de Noël mêlant sacré et profane, et des expositions de dernière minute. Bref, tout le monde s’active comme si l’année culturelle se jouait en un seul mois. Et franchement, il y a de quoi se poser des questions. On ne va pas se mentir : les artistes malgaches ne sont pas là uniquement pour nous divertir entre deux repas de fête. Ils bossent, ils créent, et à leur niveau, ils font tourner l’économie. Le secteur culturel et créatif représentait environ dix pour cent du PIB national et ferait vivre plus de deux millions de personnes. Pas mal pour un domaine qu’on considère encore trop souvent comme un simple passe-temps sympathique, non ?
Alors oui, ce bouillonnement de décembre fait plaisir. On apprécie ces moments où la création explose, où les talents se révèlent, où la culture devient enfin visible. Mais justement, pourquoi faut-il attendre décembre pour que cela se produise ? Pourquoi cette concentration frénétique sur quelques semaines, alors que les artistes travaillent toute l’année ? Des mouvements sont actuellement en gestation pour revendiquer leur statut d’acteurs économiques essentiels et pour que l’on accorde à nos créateurs une place réelle dans la machine économique du pays. La culture malgache vaut bien mieux qu’un feu d’artifice annuel. Elle mérite qu’on lui accorde l’attention qu’elle réclame douze mois sur douze.

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Photos : Andriamparany Ranaivozanany

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