Ambondrombe, cette terre mystérieuse, suscite un vif intérêt, notamment chez la jeune génération avide de percer ses énigmes. Dans notre quête de vérité, nous souhaitons, ne serait-ce qu'en partie, éclairer les mystères qui enlacent ce lieu chargé d'histoires en révélant les exploits de Monsieur Latimer Rangers, un journaliste renommé de la radio nationale malgache, qui a jadis atteint les sommets sacrés de cette montagne.
En Imerina, une des ethnies de Madagascar, résonne un proverbe immémorial qui dit : « Comme une vieille décédée le jour de la fête du Bain : elle n'a plus part aux réjouissances sur la terre et n'en a pas encore à Ambondrombe ! ». Les rumeurs qui voilent cette terre historique ne sont pas nouvelles. La foi ancestrale susurre que toute âme malgache défunte rejoint Ambondrombe, écartant ainsi l'existence d'un royaume aux cieux et d'un royaume en enfer. S'élevant tel un sanctuaire mystique, Ambondrombe se niche dans les alentours de la région montagneuse d'Andringitra, baignant dans le district d'Ambalavao Tsienimparihy, au cœur de la région Haute Matsiatra. La commune d'Ambohimahamasina borde ce lieu sacré, et se situe à près de 50 km de la cité d'Ambalavao Tsienimparihy, toujours au sein de la Haute Matsiatra.
En juillet de l'année 1971, un journaliste intrépide, dont le regard s'était égaré aux nombreux horizons de Madagascar, a décidé de gravir la montagne d'Ambondrombe. Durant ce mois, il se consacra à interroger les habitants, disséminés aux alentours d'Ambalavao Tsienimparihy. Les récits des habitants révélèrent que les nuits aux abords d'Ambondrombe étaient tourmentées par les murmures mystérieux des esprits qui peuplaient cette contrée, rendant le sommeil presque impossible. D'après leurs témoignages, une symphonie hétéroclite de sons s'élevait dans l'air nocturne : l’entraînant chant d'un Aponga, la douce mélodie d'un Sodona, les caquètements des coqs, les meuglements des zébus, les cris joyeux des enfants s'amusant, les tambours des femmes pilant le riz, et bien d'autres encore… À la suite de cette série d'entretiens orchestrée au marché d'Ambalavao, ils cheminèrent en direction de la commune d'Ambohimahamasina, ultime étape accessible en véhicule avant de parvenir à Ambondrombe.
1 - « Chacun devra transporter ses déjections au cas où... »
Le déjeuner achevé, l'odyssée pédestre débuta depuis la paisible commune d'Ambohimahamasina. « J'ai été accompagné par des habitants qui m'ont servi de guides et qui m'ont aidé à transporter mes bagages tout au long du parcours », raconta le journaliste. « Ce jour-là, j'étais déterminé à passer la nuit au sommet de la montagne, dans l'espoir de capturer des sons pour les transmettre aux auditeurs de la radio nationale », expliqua-t-il ensuite. Toutefois, le vétéran fut pris au dépourvu lorsque, aux alentours de quinze heures, les guides suspendirent soudainement leur marche, stoppant net leur ascension. Ils avaient l'assurance qu'ils parviendraient à destination qu'à la tombée de la nuit s'ils persistaient sur leur chemin, alors qu'ils n'avaient pas prévu d'y dormir. De plus, il était tout aussi crucial de prendre en compte le fait que le sommet d'Ambondrombe revêtait une aura sacrée, prohibant strictement toute défection en ces lieux, sous peine de connaître des conséquences néfastes.
Ainsi, face à cette situation, une pratique de substitution s'impose : un simple morceau de bambou devient l'ultime recours pour satisfaire les besoins pressants. Toutefois, ce détour impose un fardeau, car chacun doit alors porter ses excréments à la main, jusqu'à ce que le pied de la montagne soit atteint, où ils peuvent être jetés. Cette contrainte, quelque peu désagréable, conduit d'ailleurs les habitués à éviter l'ascension fréquente d’Ambondrombe. De ce fait, lors des séjours dans cette région, il n'est pas rare de devoir camper au milieu de la montagne pour passer la nuit.
2 - « Le rugissement des esprits fait écho. »
« Dans l'obscurité de cette nuit emblématique, j'ai choisi de demeurer éveillé, déterminé à ne rien laisser échapper des événements qui pourraient se déployer, » affirme-t-il. « Aux alentours de vingt-deux heures, mes oreilles ont saisi un délicat entrelacs de sons étrangement familier, semblable à celui d'un aponga. J'étais sûr d'avoir capté ce son de Langoroana (une variante de l'aponga) » se rappelait-il. Ensuite, l'épaisseur de la nuit enveloppa de nouveau l'environnement, dissipant l'effervescence du moment précédent. Cependant, lorsque le cadran marqua les vingt-trois heures, une étrange tournure des événements vint perturber cette quiétude.
« Des mugissements de bœufs, confondus avec des aboiements plaintifs, s'élevèrent, telle une énigme qui s'offrait à mes sens éveillés » déclara Latimer. Loin de se résigner à attendre l'aube, il était animé d'une ardente curiosité, mue par le désir de percer à jour ce mystère. Il réveilla ses compagnons, ensemble, ils s'enfoncèrent pour déterminer d'où émanait ce chant énigmatique. « Serait-ce le signe qu’une ville ou des gens habitent à proximité ? » s’interrogea-t-il, plongé dans une profonde réflexion. Or, ces derniers rapportèrent que le village le plus proche de leur campement se tenait à 5 ou 6 km. À cette distance, il semblait quasi impossible d'entendre les mugissements des bœufs ou les voix animées des villageois. Dans leur quête infructueuse, ils regagnèrent leurs couches, laissant les énigmes de la nuit subsister dans l’obscurité. À la suite de cet événement, Latimer ne retrouva plus le sommeil, guettant le moindre bruit, mais hélas, les étranges voix de 23 heures furent les seules à hanter sa nuit jusqu'à l'aube.
3 - « Le sommet »
Au lever du soleil, vers six heures du matin, ils se mirent en route, bravant les sentiers escarpés jusqu'à atteindre enfin le sommet. Là, il découvrit un lac, cerné par une végétation de roseaux, mais il dut se tenir à distance, car le lieu était sacré, nécessitant un rituel spécial pour être approché. Les compagnons de voyage lui confièrent aussi que par temps clair, lorsque le ciel se dépouille de ses nuages, on peut contempler la mer de Manakara s'étendant à perte de vue, ainsi que le serpentant fleuve de Matitanana, à Vohipeno. À cet endroit mystérieux, notre explorateur aiguisa son regard et remarqua une étrange pierre d'édifice, arborant le chiffre 1930 gravé dans le ciment. D'après ses recherches, il attribua cette énigmatique marque à un certain géomètre français nommé « Louis Besson », qui aurait ainsi érigé ce point géodésique pour mesurer l'altitude de la montagne. Quand l'horloge indiqua treize heures, il fut temps de reprendre le chemin en sens inverse, de redescendre de ce sommet hanté, et finalement de toucher terre ferme aux abords de la montagne, au crépuscule.
4 - « Analakely est envahie »
À l'arrivée à Antananarivo, la diffusion des voix enregistrées sur la montagne provoqua une onde de choc parmi les auditeurs de la radio. Les voix mystérieuses semaient le trouble et suscitaient la peur chez les spectateurs. « Quand cesserez-vous, monsieur Latimer, de nous effrayer avec ces histoires de hantises ? » se lamentaient les fidèles dans des appels téléphoniques empreints d'inquiétude. Une semaine après cette étrange diffusion, le hasard ou le destin, nul ne le sait, fit éclore un phénomène inhabituel. Pendant deux à trois jours, le jardin d'Analakely, niché au cœur de la capitale, s'emplit d'une multitude de papillons. Un spectacle féerique et mystérieux qui suscita bien des interrogations.
Beaucoup établirent un lien entre le passage du journaliste à Ambondrombe et cet étonnant événement. Pour certains, cela relevait incontestablement du paranormal, une manifestation liée à la transgression de l'interdit, alors que le journaliste avait foulé une terre sacrée.
Les faits relatés dans les histoires sont réels et ont été vécus par les narrateurs.