Menacées à l’échelle mondiale, les tortues terrestres malgaches font l’objet d’un combat urgent mené par l’ONG internationale Turtle Survival Alliance (TSA). Présente dans 17 pays, TSA concentre à Madagascar son programme le plus ambitieux. À l’occasion du retour du festival culturel Rebeke, dédié cette année à la protection de ces espèces emblématiques, rencontre avec Andry Fandresena TRINH VAN MOÏ, responsable plaidoyer, partenariats et communication.
Quelles sont les activtés de TSA à Madagascar ?
Depuis 2011, Turtle Survival Alliance (TSA) se consacre à la conservation des quatre espèces de tortues terrestres endémiques : Astrochelys radiata (sokake), Astrochelys yniphora (angonoka), Pyxis arachnoides (sokabato) et Pyxis planicauda. L’association agit sur quatre axes : prise en charge des tortues issues des trafics, réintroduction dans leur milieu naturel, implication des communautés locales et soutien aux institutions publiques. Ces trafics, multiformes, vont de la vente illégale à l’exportation clandestine, en passant par le prélèvement pour la consommation ou même la domestication, une pratique souvent ignorée mais strictement interdite par la loi malgache et la convention CITES.
Quelle est l’ampleur de ces trafics et comment y répondez-vous ?
À ce jour, TSA héberge environ 23 000 tortues dans ses centres, dont plus de 1 000 confisquées rien qu’en 2024. Les saisies connaissent des pics avant l’hiver, période où les tortues sortent chercher de l’eau et deviennent plus vulnérables. L’objectif est ambitieux : réintroduire chaque année jusqu’à 5 000 tortues. Mais cela exige des études précises sur les habitats et la disponibilité des ressources.
« Lors de notre lancement, nous avons dû prendre en charge 10 000 tortues en une seule année », rappelle TSA. Chaque tortue reçoit des soins vétérinaires, passe en quarantaine, puis rejoint les centres d’acclimatation d’Androy ou d’Atsimo Andrefana. En parallèle, des études écologiques et sociales permettent d’identifier les zones de réintroduction tout en collaborant avec les communautés locales.
Ces communautés ont-elles un rôle clé ?
Absolument. Les trafics sont souvent liés à la pauvreté. TSA développe des activités génératrices de revenus, forme à l’agriculture durable, construit des infrastructures scolaires et propose des alternatives pour réduire la dépendance aux ventes illégales. Les croyances traditionnelles jouent aussi un rôle ambivalent : certaines alimentent les trafics — comme l’idée que les tortues soignent ou protègent de la foudre — mais d’autres, comme à Androy où elles sont vénérées, peuvent être des leviers pour la conservation.
Des projets ou événements pour sensibiliser ?
TSA organise cette année le festival Rebeke à Tsihombe (28-30 août), où le chant Beko et la protection des tortues s’entremêlent. À Antananarivo, une campagne contre la domestication sera prochainement lancée, assortie d’un tournoi de football au Stade Barea, avec animations et stands éducatifs. « Multiplier les formats, c’est aussi multiplier l’impact », conclut TSA.
Propos recueillis par Mpihary Razafindrabezandrina