Avant de cofonder Bôndy et de participer à la plantation de 10 millions d’arbres ainsi qu’à la restauration de 2 000 hectares de forêt, Nelson était déjà sensibilisé à la protection de l’environnement. En Suisse, où il a grandi, ses nombreuses balades en montagne l'ont habitué à un cadre préservé et verdoyant. Mais lors de ses voyages fréquents à travers Madagascar pendant le lycée, il a été frappé par l'ampleur de la déforestation. Sur la route, il découvre des paysages marqués par les feux de brousse, la terre aride et défrichée. « Mon premier voyage était vers Majunga. J’ai senti un déclic en voyant ça : pourquoi Madagascar, un hub de biodiversité, est-il aussi impacté par la déforestation ? » C’est ainsi qu’a germé l’idée de créer Bôndy avec Max Fontaine, au fil de leurs années d’études. « Il existait des initiatives de reboisement, mais sans réel suivi. On s’est dit : pourquoi ne pas professionnaliser ce secteur en accompagnant les entreprises pour qu'elles aient un véritable impact et assurent une gestion durable de leur reboisement ? ».
Au-delà de son engagement institutionnel, Nelson applique au quotidien des gestes simples et accessibles à tous. Chez lui, un collecteur vient récupérer les bouteilles en plastique chaque mois pour les recycler, même si cela reste informel. « On utilise aussi des panneaux solaires, ce qui réduit nos factures d’électricité, d'autant plus que la JIRAMA repose largement sur des énergies thermiques. » Il insiste sur l’importance d’un habitat bien conçu et isolé pour limiter l’usage de la climatisation ou du chauffage. Il privilégie les fruits et légumes locaux pour éviter l’empreinte carbone des produits importés et encourage l’utilisation de charbon écologique plutôt que du charbon de bois classique. Concernant la gestion des déchets, il admet que le tri nécessite un véritable suivi pour être efficace à Madagascar. Son entreprise s'efforce cependant d’apporter des solutions concrètes. « À la cantine, nous compostons nos déchets organiques plutôt que de les jeter ». Quant à ceux qui restent indifférents aux enjeux environnementaux, Nelson distingue plusieurs raisons. D’un côté, il y a la contrainte économique : « Je discute souvent avec des communautés locales qui dépendent des forêts pour survivre. On leur reproche la culture sur brûlis, mais en échangeant avec eux, on comprend qu'ils n'ont pas d'autre choix. » Du côté des citadins, le manque de connexion avec la nature peut expliquer un certain désintérêt. « J’ai rencontré quelqu’un qui vit à Tana depuis 30 ans et ne se soucie pas vraiment de l’environnement. Il n’en a simplement jamais pris conscience, parce qu’il est toujours resté en zone urbaine. Quand on ne voyage pas, qu’on ne sort pas de la ville, on perçoit moins les effets du changement climatique. Certes, il y a des cyclones, des inondations, une pollution de l’air due aux feux de brousse, mais tout cela semble abstrait ». Selon lui, la clé réside dans l’ouverture au monde. « Plus on est ouvert au monde, plus on se rend compte des problèmes environnementaux et de leur urgence ».
Mpihary Razafindrabezandrina
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Ranto n’aime pas être appelé « écolo ». Mais il fait ce qu’il peut, à son échelle, pour préserver l’environnement. Mais alors, pourquoi « pas écolo » ? « Je ne me définis pas par rapport à cela. Je ne suis pas d’accord avec la manière dont ceux qui se disent « écolos » expriment leurs idées, avec les solutions qu’ils proposent et l’action de certains d’entre eux quand ils ont accès au pouvoir. » Parmi les exemples qu’il cite : les formes de manifestations écologistes qui consistent à « porter des pancartes avec un slogan vulgaire et les laisser un peu partout à la fin de la marche… Ce n’est pas très écolo. » Peu convaincu, il fait ses propres pas dans le sens de ses valeurs et de ses connaissances. « Les petites actions comme économiser l’eau, ne pas jeter mes ordures partout, faire le tri des déchets et ne pas gaspiller l’électricité, j’accepte et je fais tout cela. Je fais ce que je peux faire. » Mais Ranto n’aime pas les contraintes qu’apportent les idéaux écologistes. « On dit souvent que l’élevage est un des facteurs de la pollution et qu’il est préférable d’être végan.
Mais en France, par exemple, pour qu’un végan puisse manger un toast à l’avocat, il faut qu’il l’importer du Brésil, ce qui pollue davantage et ce n’est pas très écolo ! » Il aime rappeler que le meilleur moyen de consommer moins est de favoriser le circuit court et d’acheter localement. Des contradictions comme cela, Ranto en voit beaucoup. Par son habitude de faire des recherches et de rester à l’affût des nouvelles, il se fait sa propre opinion du monde et des solutions actuelles : « Si l’on parle de transition énergétique, en Allemagne par exemple il y a eu une résolution d’arrêter l’utilisation de l’énergie nucléaire et de se concentrer sur l’énergie solaire et éolienne, qui sont pourtant intermittents. Alors, pour combler le déficit, ils ont décidé de réutiliser la centrale à charbon. La transition a été ratée ! Sans oublier que l’éolienne tue 10 à 18 oiseaux par an. Un écolo devrait également penser à la biodiversité. » Il n’est pas d’accord sur la taxe carbone, comme il ne l’est pas à l’idée d’ajouter des charges aux industriels qui créent des emplois. Dans son élan, Ranto fait toujours attention à ses actions. Pour lui, un monde idéal est un lieu où personne ne devrait être obligé de se conformer aux idéaux du mouvement, un milieu libre où entre « écolo » et « pas écolo », il est toujours bon d’enlever les œillères.
Rova Andriantsileferintsoa